Texte et mise en scène Côme de Bellescize
Sam et Sarah essaient en vain d’avoir un enfant. La mère de la jeune femme, nourrie au biberon MLF, a beau vanter la liberté sans maternité, le couple persiste et signe pour une fécondation in vitro, couronnée de succès. Hélas, le bébé s’annonce mal formé… Naître ou ne pas naître, là est la question…
Sarah est la seule à vouloir le garder. Mais de drôles de visions viennent la tourmenter. Un mystérieux « enquêteur » l’accuse d’avoir mis au monde une petite Eugénie difforme, malheureuse au square et à l’école. Elle plaide coupable mais ne peut renoncer à donner la vie, même laide, même fragile. Son mari la quitte et Sarah flanche… jusqu’à l’ultime rebondissement. Côme de Bellescize, auteur-metteur en scène, aime les sujets qui dérangent. Sa première pièce traitait des migrants, la seconde de l’euthanasie. Il pose ici la question du handicap sur un ton qui mêle le réel à l’imaginaire, le tragique au cocasse.
Lemonde.fr – Evelyn Tran « Une mise en scène inventive, poétique et drôle, servie par d’excellents comédiens »
Théâtre.com « Ce spectacle intense et fort constitue un coup de cœur unanime de notre rédaction »
Marianne – Jack Dion » Sur cette problématique un rien casse gueule, Côme de Bellescize signe une pièce aussi délicate que drôle »
Fous de théâtre, Thomas Baudeau « Du vrai, du grand, du beau théâtre. Accessible, utile, et puissant. »
Texte et mise en scène Côme de Bellescize
Avec
Philippe Bérodot Le Client, le Docteur, le Flic, l’enquêteur
Jonathan Cohen Sam
Éléonore Joncquez Sarah
Estelle Meyer X, Eugénie, la mère
[COLUMN]
Scénographie Sigolène de Chassy
Lumières Thomas Costerg
Son Lucas Lelièvre
Musique originale Yannick Paget
Costumes Colombe Lauriot-Prévost
Assistante à la mise en scène Jane Piot
Avec Eugénie, j’ai voulu aborder une situation à laquelle ma génération est confrontée : la stérilité des couples et la « technicisation » de notre rapport à la reproduction. C’est une donnée prégnante pour ma génération de « trentenaire urbain », avec un terreau de questionnements éthiques qu’il me semble nécessaire d’explorer. La question du handicap qui s’y ajoute me permet de travailler sur deux formes de violence. Une violence sociale, celle de la standardisation et de la force normative de notre société, et une violence primitive : la figure monstrueuse portant en elle une dimension tragique qui découvre des mécanismes impitoyables, qui se dissimulent parfois derrière une sollicitude exacerbée. Dans Eugénie, je cherche à saisir cette ambivalence, cette coexistence de mouvements opposés, spécifique à notre rapport au monstre. Pour cela, je me suis plongé dans la vie psychique et dans les contradictions intérieures de mes personnages, en effaçant la distinction entre réel et fantasmé. Cela produit un récit à la structure complexe, avec une quinzaine de personnages et autant de lieux. La mise en scène jouera sur l’ambiguïté de leur nature : on ne sait pas si ces lieux sont métaphoriques ou s’ils renvoient à une réalité ; et quand cette réalité est déformée, on ne sait pas quel est le sens de cette déformation. De même, la nature des personnages est hybride, entre apparition fantomatique, projection mentale et réalité crue (aux deux sens du terme). Tout l’enjeu de la mise en scène est de rendre sensible et intelligible cette construction complexe et d’accompagner le spectateur dans cette structure labyrinthique. La question n’est pas : comment figurer les espaces ou incarner ces nombreux personnages, mais plutôt : comment rendre sensible l’évolution de leur nature, du réel au fantasmé et du fantasmé au réel. Le spectateur ne doit pas se demander si la scène qui se joue devant lui est ancrée dans le rêve ou dans la réalité ; il doit savoir. Ou croire savoir…
Côme de Bellescize
Côme de Bellescize
Après des études universitaires et une formation de comédien à l’École Claude Mathieu, Côme de Bellescize crée la compagnie du Théâtre du Fracas avec Vincent Joncquez. Entre 2004 et 2007, il met en scène son texte Les Errants (Prix Paris jeunes talents 2005). En 2008, il crée Les Enfants du soleil de Maxime Gorki (Théâtre de l’Ouest-Parisien puis Théâtre 13, Paris.) Il met ensuite en scène Ah ! Anabelle… de Catherine Anne (Théâtre Nanterre-Amandiers) puis écrit et met en scène Amédée (création mai 2012 au Théâtre de la Tempête à Paris, et reprise au Théâtre 13/Seine, octobre 2013, il est nommé dans la catégorie du meilleur auteur pour le Prix Beaumarchais du Figaro). En août 2012, il met en scène l’Oratorio Jeanne d’Arc au bûcher (Honegger/Claudel) au Festival Seiji Ozawa Saito Kinen au Japon, sous la direction de Seiji Ozawa, qui sera repris en mars 2015 à la Philharmonie de Paris puis à New York (New York Philharmonic) avec Marion Cotillard dans le rôle de Jeanne. Au cours de l’été 2013, il participe à l’Atelier Opéra en Création de l’Académie Européenne de musique sous la direction de Manfred Trojahn. En décembre 2013, il conçoit et met en scène Viardot, la Liberté, spectacle musical à partir des correspondances et du répertoire de Pauline Viardot pour le Festival d’Aix en Provence. En juin 2014, il met en scène au Théâtre du Jeu de Paume la Scala di Seta de G. Rossini (Résidence de l’Académie Européenne de musique, Festival d’Aix en Provence.) Toujours en 2014, il est accueilli en résidence d’écriture par le festival des Théâtrales Charles Dullin dont il est le créateur associé et écrit Laisse la jeunesse tranquille. Une maquette de ce texte a été présentée fin 2014 dans le cadre du festival, mis en scène par Lena Paugam et sera créé courant 2015. Parmi ses projets à venir, citons une nouvelle production de Béatrice et Bénédict (Berlioz) dirigée par Seiji Ozawa qu’il va mettre en scène au Festival Seiji Ozawa Matsumoto au Japon, en août 2015.
« Eugénie » ou les vertiges d’une grossesse bousculée
Dans sa nouvelle pièce, Côme de Bellescize explore le trouble d’un jeune couple auquel on annonce le handicap de leur enfant à naître.
[…] Voici donc le spectateur embarqué dans l’épopée de Sam et Sarah, au milieu d’une galerie de personnages habilement interprétée par quatre comédiens talentueux, qui campent aussi bien le mandarin hospitalier, que le bébé à peine conçu ou encore les fantômes d’un avenir redouté. Le tout sur une scène mêlant l’ordre et de chaos, miroir de la vaine tentative de chacun des personnages de donner un sens au tragique. « Il n’y a qu’en Mondrian qu’on puisse avoir confiance, constate ainsi le client féru d’art qui vient acheter une photocopieuse dans la boutique de Sam. Des droites, des couleurs primaires sur fond blanc. C’est tout et c’est déjà énorme. Le nombre de combinaisons possibles est infini et l’infini est suffisamment inquiétant pour qu’on se mette à chercher ailleurs ».
La Croix– Marine Lamoureux, 17 novembre 2015
La superbe plénitude du théâtre de Côme de Bellescize…
[Côme de Bellescize] propose “Eugénie“ et nous pousse cette fois-ci à regarder en face le handicap, l’“anormalité“, ébranlant nos éventuelles certitudes sur le sujet dans un spectacle aux qualités et intentions similaires. Du vrai, du grand, du beau théâtre. Accessible, utile, et puissant.
Evoluant au coeur d’une scénographie pas vraiment réaliste, représentant “l’anarchie mentale des personnages“, où les photocopieuses que vend Samuel côtoient canapé du salon et fauteuil roulant autour d’un large réceptacle rempli de terre, symbole de fertilité ou lit de mort, les interprètes nous font passer du rire aux larmes. […] Souvent bouleversants, les échanges de chacun avec Eugénie. Glaçante la vision du bras saisissant une pelle, s’apprêtant à éradiquer le petit être en devenir. Pour le moins percutantes et édifiantes, les représentations de l’avenir…
Perdus, désemparés, à vif, Eléonore Joncquez et Jonathan Cohen s’avèrent saisissants d’authenticité dans le rôle des futurs parents. Justes dans tous les registres, toutes les situations. Les plus dures, les plus drôles, les plus excessives, les plus improbables. Assez exceptionnelles, les compositions d’Estelle Meyer, tour à tour embryon décrochant, grand-mère grandiloquente au féminisme particulier, égocentrique à souhait, volontiers infecte, et surtout splendide Eugénie, incarnée avec profondeur, subtilité, intensité. Parfait aussi Philippe Bérodot en médecin tout sauf réconfortant, acheteur de copieurs-“reproducteurs“ infaillibles, ou flic traqueur d’enfant. Les quatre acteurs nous embarquent admirablement dans la singulière épopée pensée par le chef de troupe. Foncez !
fousdetheatre.com – Thomas Baudeau, 17 novembre, 2015
Eugénie : ode à l’acceptation par Côme de Bellescize
Si, de prime abord, le sujet semble plombant, son auteur, Côme de Bellescize, arrive à le traiter avec équilibre entre distance et gravité. Il sait mettre de l’humour et de la tendresse dans les moments de désespoir, sans jamais bafouer son propos : l’acceptation de la différence et la difficulté de devenir parent.
Les quatre acteurs, plongés dans des situations fantasques, parviennent à garder leur intériorité. Ils sont le frêle esquif qui traverse la tempête des mots de Bellescize. Les personnages ne sombrent jamais dans la caricature. On pense notamment à Estelle Meyer, actrice aussi talentueuse que chanteuse, et qui passe d’un personnage à l’autre avec finesse, tout en berçant la scène de sa voix mystérieuse. L’ambiance, le rêve, le cauchemar et l’avenir : voilà ce dans quoi nous plonge « Eugénie », un spectacle complet, absolument moderne.
www.sceneweb.fr – Hadrien Volle, 19 novembre 2015
Le Christ, la révolte, et les aléas de la vie
[…] On se consolera en retrouvant Côme de Bellescize au Théâtre du Rond-Point avec sa dernière création, tout aussi originale que les précédentes. Cela s’appelle « Eugénie », du nom de la petite fille qui sera handicapée si elle naît. Mais faut-il, dans ces conditions dramatiques, donner la vie ou pas ? Sur cette problématique un rien casse gueule, Côme de Bellescize signe une pièce aussi délicate que drôle, une pièce où la pertinence du propos est renforcée par une grande intelligence de jeu, avec des acteurs explosifs.
[…] On pourrait craindre le pire, le pathos à tous les étages, l’invasion lacrymale inévitable. Mais Côme de Bellescize a l’art de mêler le sérieux du propos et le burlesque déjanté. Les scènes sont dignes des Marx Brothers à l’hôpital. Les échanges entre Sarah et sa mère féministe hard (Estelle Meyer, qui joue également le rôle de la future Eugénie) sont un pur moment de bonheur. Alors que l’on est toujours sur le fil du rasoir, les débats entre Sam et Sarah sonnent juste. Côme de Bellescize confirme ce que disait Louis Jouvet : « Au théâtre, il n’y a rien à comprendre, mais tout à sentir. »
Rideau, Blog Marianne, Jack Dion – novembre 2015
Eugénie
Côme de Bellescize ose un essai très intéressant sur l’indicible souffrance d’être parents d’un enfant handicapé. Soutenu par des comédiens ultra convaincants, il fait mouche avec autant de pertinence que de pudeur.
[…] il met les pieds dans le plat et ose installer au plateau des débats que l’on préfère taire, tant on a du mal à admettre que faire des enfants, comme ne pas en faire, relève du même désir égoïste.
Le juste équilibre entre vérité et respect
Le texte de la pièce, remarquablement installé entre réalisme et fantasme, rêve et crudité cruelle, passe en revue toutes les postures intellectuelles et morales autour de cette question. […] Avec une drôlerie efficace, Côme de Bellescize met en scène les délires reproductifs d’une génération à laquelle la médecine offre le pouvoir de contrarier la nature. Il évoque les conflits intergénérationnels entre une mère soixante-huitarde adepte de la liberté (géniale composition d’Estelle Meyer) et sa fille au narcissisme antagoniste. Eléonore Joncquez et Jonathan Cohen campent avec une grande justesse le couple de bobos adeptes de l’in vitro, incapables de lutter sereinement contre ses effets tératogènes. Philippe Bérodot, excellent dans tous les seconds rôles, assume le reste de la distribution avec un magistral talent de composition. Drôle, poignante, insupportable parfois – quand on en vient au paroxysme des débats et de la douleur – mais toujours finement interprétée, cette pièce évacue la langue de bois et la bien-pensance avec un courage salvateur et une justesse remarquable.
La Terrasse – Catherine Robert, 28 novembre 2015
Production Compagnie Théâtre du Fracas
Coproduction Le Théâtre de Rungis, Théâtre du Rond-Point, Théâtre Gérard Philipe / Champigny-sur-Marne, ECAM – Théâtre du Kremlin-Bicêtre.
Avec le soutien du Théâtre de l’Éphémère / Mans, du Théâtre de Suresnes Jean Vilar , du ministère de la Culture et de la Communication / DRAC Île-de-France, de l’Adami – société des artistes-interprètes, du Fonds SACD musique de scène, du Fonds SACD théâtre, d’Arcadi Île-de-France, de la Spedidam, du Conseil départemental du Val-de-Marne.
La compagnie a été accueillie en résidence au Théâtre Paul Éluard de Choisy-le-Roi et au Théâtre de Rungis, création du spectacle au Théâtre de Rungis le 4 novembre 2015. Le spectacle a reçu le soutien de Malakoff Médéric Mutuelle, partenaire de la compagnie du Théâtre du Fracas.
Le texte est publié aux Éditions L’avant-scène théâtre, collection des quatre vents.