Chef d’orchestre Alexandre Romanès
Si la magie du cirque crée mondes et merveilles, la magie de ce cirque-là est encore bien plus puissante.
Le Cirque Romanès est une expérience unique, celle d’une plongée en pays tzigane, un voyage immobile offert par un peuple de promeneurs. Saltimbanques, bonimenteurs, musiciens, les Romanès perpétuent les numéros de cordes, de tissus, de jonglage, que leurs parents leur ont transmis et que les petits apprennent déjà. Sous la houlette de Délia, magnifique chef de troupe, la musique des Balkans enveloppe les acrobates.
La poésie tient autant à la grâce des propositions, parfois si simples, qu’à l’énergie tellurique de la fanfare et du clan. Pour ce nouveau spectacle, le patriarche Alexandre Romanès nous conte l’histoire de Rajenka, « Rose ou la Princesse gitane aux semelles de vent », aussi indomptable que l’air, et retrace, dans une joyeuse farandole, le chemin du dernier peuple nomade.
Chef d’orchestre Alexandre Romanès
Avec Rose-Reine, Alexandra, Aline, Irina, Cléo, Rose, Alexandra, Alexandre, Ariadna, Nicoleta, Roza, Betty, Gouloum, Bogdan, Ivan, Sorin
Violon Costobita
Accordéon Ionut
Guitare Nelu
Contrebasse Dangalas
Clarinette Gigel
Saxophone Alexandre
Chant Délia
Ma famille fait du cirque avec un chapiteau depuis la première guerre mondiale. Avant, mon arrière-grand-père donnait un spectacle en plein air sur la place du village. Il allait de village en village avec ses trois femmes, ses enfants et un ours. « L’embêtant, disait-il, c’est l’ours. » A 25 ans, j’ai quitté le cirque familial, le cirque de mes parents ressemblait de plus en plus à un hangar pour avions, j’ai jeté l’éponge, je suis parti. Pendant quelques années j’ai fait mon numéro d’équilibre dans la rue. J’étais depuis longtemps attiré par la poésie, je me suis lié d’amitié avec des poètes : Jean Genet, Jean Grosjean, Christian Bobin, Jean-Marie Kerwitch, Thierry Metz, Dominique Pagnier. J’ai travaillé à l’élaboration d’un spectacle de cirque avec Jean Genet. Il y avait assez de matériel pour faire 4 heures de spectacle. Quand il a fallu passer à la réalisation, j’ai pris ma voiture et je suis parti sur les bords de la Loire faire des paniers en osier …Dix ans plus tard, je redécouvre le cirque dans le campement tsigane de Nanterre. J’ai rencontré Délia que j’ai épousé, j’ai acheté un petit chapiteau, un vieux camion, quelques caravanes, et nous avons pris la route. Quelques gitans dans une piste, Délia au chant, entourée d’un violon, d’une contrebasse et d’un accordéon. Même dans mes rêves les plus fous, je n’aurais jamais imaginé avoir autant de succès avec un spectacle aussi dépouillé. Le violoniste Yehudi Menuhin m’a dit : « Jusqu’à mon dernier jour je penserai à vous. »
La vie n’est jamais comme on croit.
Alexandre Romanès
Connu dans le monde entier, le Cirque Romanès est le plus petit cirque du monde : « Au moins, cela nous empêche de devenir riches », dit Alexandre Romanès. Chapiteau de vingt mètres au faîte, jongleurs, acrobates, six musiciens en piste sur un rythme bolide : les 90 minutes passent comme un rêve réel. Non seulement le Cirque Romanès « a l’Ange », expression des artistes andalous, mais tous ses fabuleux acteurs, du petit chien Picky à Alexandre Romanès en personne, « ont l’Ange » . Avoir l’Ange, chez les Tziganes au sud du sud, les Gitans d’Andalousie, c’est une façon de dire avoir la grâce. Avoir l’Ange, c’est avoir la grâce de l’instant, la grâce imméritée mais celle qu’on provoque, celle qui foudroie, sourire aux lèvres ; avoir l’Ange, c’est avoir le don, la chance, un enchantement spécial, l’âme bordée de nouilles. Le Cirque Romanès est de retour […] Métaphysique rayonnante : Romanès est le cirque d’où l’on sort mieux, guéri des bêtises ordinaires, pacifié, transporté, tremblant d’une énergie soudaine. Duo d’amour en l’air Rajenka ! sert de titre et d’appel au nouveau spectacle. Toutes les filles du Cirque Romanès ont l’Ange. Rose (Rajenka, en langue tzigane), danse au sol, se contorsionne, danse gracieuse en aérien, ou fait le pitre. Une autre grimpe le long d’une barre en tirant de drôles de mines, la fildefériste à des airs de fée. Présente d’un bout à l’autre du spectacle (de la vie), Délia « la Terrible » habille de son chant les numéros aux airs naïfs ou ceux qui sont risqués. Par bonheur, on ne comprend pas ce qu’elle dit, car parfois elle insulte, sans que l’on s’en doute.
Francis Marmande – Le Monde, 2015
[COLUMN]
Au cirque Romanès, l’accueil se fait dans une atmosphère généreuse. Et dans une ambiance festive, le spectacle commence bien avant […] le début de la représentation. […] Délia et Alexandre Romanès accueillent leurs spectateurs comme des amis qu’ils connaîtraient depuis toujours. Dès l’entrée et pendant tout le spectacle, un bel orchestre joue des airs tsiganes, les musiciens sont souriants, l’ambiance est joyeuse et on ne se prend pas au sérieux. Jongleurs et danseuses aux cerceaux se partagent tour à tour la piste, c’est rapide et on ne s’ennuie pas. Les artistes ne sont pas infaillibles, mais qu’à cela ne tienne ! C’est ce qui les rend particulièrement attachants. Les numéros d’acrobatie nous font tourner la tête et parfois aussi celle des athlètes, la contorsionniste nous retourne, les acrobates aux trapèzes et au mât, gracieux, se passent avantageusement du strass et des paillettes. La taille du chapiteau et la proximité avec les artistes permettent d’apprécier des figures et des portés qui nous enchantent, tout autant que la musique omniprésente et la magnifique voix de Délia sans laquelle le spectacle ne serait pas tout à fait le même.Toute la famille participe. Le seul fauve du cirque est un chien de race approximative dont on est sûr qu’il n’a pas souffert de son dressage. La prestation de la jeune Rose-Reine, la petite dernière, en toute fin de représentation, s’avère flamboyante. Le cirque Romanès, c’est définitivement une affaire de famille, une gentillesse sincère et un charme particulier qui ajoutent à la qualité des numéros. A ce spectacle enchanteur viennent s’ajouter la poésie, la malice et l’humour d’Alexandre Romanès, le patriarche et poète (publié chez Gallimard), qui sait puiser dans sa collection de proverbes gitans ceux qui, anciens, n’en sont pas moins d’actualité.
Anne-Sophie Chevalier – Le Parisien, 2014