Mise en scène Nathalie Grauwin
D’après La Peur des coups, La Paix chez soi, Les Boulingrin, Le Gora de Georges Courteline
Il s’en passe des choses dans ces bras-là ! Quatre couples de la petite bourgeoisie de la Belle Époque en esquissent, à tour de rôle, un croquis féroce.
Jalousie, duperie, vengeance à la petite semaine et scènes de ménage construisent et déconstruisent la tragicomédie d’un quotidien qui pourrait bien être le nôtre. Bien sûr, on rit de leurs déboires, mais sans méchanceté, parce qu’au fond, on a tous quelque chose de la fofolle ou du grincheux.
C’est à cette contemporanéité que s’attache la mise en scène de Nathalie Grauwin. Au fil de ces quatre courtes pièces, défilent des personnages atemporels, aux tracas ordinaires, jusqu’au moment où ils passent la ligne jaune et tombent « dans l’enfer du comique ».
Une dimension quasi surréaliste renforcée par la scénographie, le décor en accordéon, le recours à la magie et l’autogestion de l’espace lumineux.
Mise en scène Nathalie Grauwin
Avec Anne Girouard, Olivier Broche, Renaud Dehesdin.
Lumières Jean Grison
Mon désir de mettre en scène de courtes pièces de Monsieur Courteline s’inscrit, dans la continuité de ma dernière création du Bourgeon de Feydeau : créer un spectacle lisible par le plus grand nombre et à différents niveaux. Ce montage centré sur les rapports de couple est également un chemin, à travers l’humour, vers l’amour. L’amour dans sa folie, l’amour dans sa réalité, certes bouffonne mais néanmoins réelle. Je souhaite que ces pièces échappent à l’emprise de la réalité sociale de l’époque. La déformation amplifiée d’une société conformiste que Courteline reflète, au travers des interactions de ces couples, est au final atemporelle. C’est dans cette perspective que j’envisage chaque pièce se déclinant, à l’instar de Kracauer, comme « un terrain neutre de rencontre, un endroit irréel ». L’accent mis sur le jeu des acteurs et sur une contemporanéité participent de ce projet d’entendre ces textes, de s’identifier à ces couples mettant en scène leur vie quotidienne. L’essentiel, depuis que je fais de la mise en scène, est de placer l’acteur au centre du processus artistique. Le choix des comédiens est déjà un choix de mise en scène. L’acteur est un passeur. Gilles Deleuze parlait des écrivains en disant qu’ils sont « des êtres aux aguets » et je pense la même chose des acteurs. Il y a une forme d’animalité dans le rapport au texte et au plateau. Je souhaite approfondir ma démarche d’amener les comédiens à une incarnation du tragique source de paroxysme comique. Anne Girouard fut une cocotte magnifique et Stéphane Valensi un curé irrésistible dans Le Bourgeon. Retravailler avec eux est une évidence. Ensemble ils construiront et déconstruiront les couples. Anne Girouard sera « la femme » tour à tour provocatrice, violente, acerbe, minaudante, naïve, folle, manipulatrice et drôle. Stephane Valensi passera du rôle du mari ayant « peur des coups » à un pic-assiette qui en prendra (des coups) au mari exaspéré par l’inculture de sa femme. La scénographie sera simple et le décor ainsi que les changements de rôles se transformeront « à vue », transformables et destructibles à souhait comme le sont les histoires. Une nouvelle collaboration avec un magicien s’impose. Faire apparaitre et disparaître les personnages, les objets, selon la nature du propos. Créer un monde où tout n’est qu’illusion, comme si le spectateur venait de rêver. Un monde irréel et cependant ancré dans une réalité humaine. Ainsi décor, mise en scène, lumières et jeu des acteurs seront étroitement liés. Ce sont les personnages qui agiront sur la lumière, comme si c’était elle qui influençait les rapports. Une multitude de lampes et d’abat-jour permettront une auto-gestion de l’espace lumineux .
Nathalie Grauwin
Georges Courteline (1858-1929)
Ecrivain et auteur dramatique français qui s’attacha, avec une verve satirique, à dépeindre les travers de la petite bourgeoisie de son temps. Courteline, de son vrai nom Georges Moinaux, naquit le 25 juin 1858 ; il avait de qui tenir, puisqu’il était le fils de Jules Moinaux, humoriste et auteur dramatique (lequel lui déconseilla pourtant d’embrasser la carrière littéraire). Après son service militaire, Courteline devint fonctionnaire au ministère des Cultes ; ces deux expériences allaient lui fournir ses principales sources d’inspiration littéraire. Il passa quatorze ans dans la fonction publique, à observer ses collègues tout à loisir, avant que le succès de ses œuvres ne lui permette de se consacrer exclusivement à l’écriture. Auteur apprécié en son temps, Courteline fut décoré de la Légion d’honneur en 1899 et élu à l’Académie Goncourt en 1926. Dans ses premiers ouvrages, comme Les Gaietés de l’escadron (1886) ou Lidoire (1891), Courteline s’amusa à tourner en dérision l’armée, puis il s’attaqua naturellement aux employés de bureau et aux bureaucrates, comme c’est le cas dans Messieurs les Ronds-de-Cuir (1893). La mentalité et l’attitude des petits bourgeois firent également les frais de sa verve satirique, servie par un style admirable : son chef-d’œuvre reste peut-être sa célèbre nouvelle intitulée Boubouroche (1893), qu’André Antoine lui fit adapter pour son Théâtre-Libre. Courteline fut l’auteur de nombreux autres récits et de nombreuses pièces qui sont autant de croquis pertinents, saisis sur le vif mais sans vraie méchanceté, de tel ou tel milieu social. Citons, à titre d’exemple, des œuvres comme Un client sérieux (1896) ou Les Balances (1901), consacrées au milieu de la justice et des tribunaux, mais aussi La Peur des coups (1894), Monsieur Badin (1897) ou La Paix chez soi (1903), pièces qui n’ont d’autre prétention que d’amuser le public en lui montrant ses propres ridicules.
Production En Votre Compagnie.