De Sara Llorca, Omar Youssef Souleimane et Guillaume Clayssen
Mise en scène Sara Llorca
Dramaturgie Guillaume Clayssen
Peut-on se parler vraiment lorsque l’on n’a rien en commun ?
Andréa et Omar ne se connaissent pas. Elle est française et étudie la philosophie, il est syrien, poète et réfugié politique. Le temps d’une nuit, leurs corps se rapprochent, une conversation s’installe, et l’on plonge avec eux dans une transe entre passé et présent, fantasme et réalité.
Drôle d’époque. C’est à partir de cette incapacité à parler avec certitude du monde dans lequel nous vivons que Sara Llorca et le poète Omar Youssef Souleimane imaginent deux personnages que tout sépare, sinon des mots de plus en plus complexes à définir : guerre, terrorisme, racisme, amour, désir, désespoir, espérance politique…
Sur un plateau aux frontières mouvantes, cinq comédiens et une danseuse nous emmènent d’une chambre de bonne parisienne au camp d’Al-Ramtha, d’un poste de police jordanien à une rue damascène et un jardin d’Andalousie. Une conversation bouleversante sur le vivre ensemble.
Avec Lou De Laâge Andrea, Elie Youssef Wassim, Ingrid Estarque la Dame Rouge, Raymond Hosny Père de Wassim, un Soldat jordanien, un Syrien, Logann Antuofermo Wassim et Tom Pezier René Descartes, Blaise, le Journaliste
Scénographie et costumes Anne-Sophie Grac
Musique et création sonore Benoît Lugué et Clément Roussillat
Chorégraphie Sara Llorca et Ingrid Estarque
Lumières Camille Mauplot
Assistante mise en scène Céline Lugué
Fin 2016, nous nous apprêtions à démarrer les répétitions des Bacchantes. Au détour d’une recherche sur la tragédie, Sara Llorca tombe sur le recueil de poésie d’Omar Youssef Souleimane: Loin de Damas. Omar est Syrien. Il a participé activement aux manifestations à Damas, contre la dictature de Bachar Al-Assad. Inquiété par les services secrets syriens, il a fui la guerre en 2012. Depuis, il vit à Bobigny, près de Paris et il a le statut de réfugié politique.
Un jour, Sara et Omar décident de se rencontrer. Nous plongeons tous peu à peu dans les confessions exceptionnelles de cet ami bouleversant. Nous nous intéressons de plus en plus à l’histoire de la Syrie et du monde arabe en général.
Déjà, quelques années plus tôt, Sara avait eu l’occasion de jouer au Liban avec le metteur en scène Wajdi Mouawad — qui avait pris le temps de lui raconter l’histoire du pays et des régions voisines. Camille Mauplot, notre éclairagiste, quant à lui, a travaillé avec l’auteur-metteur en scène égyptien Ahmed el Attar et avec le metteur en scène syrien Omar Abu Saada. Au fil des auditions pour trouver
l’acteur qui interprétera Omar sur scène, nous avons fait la connaissance d’acteurs syriens en exil, tels que Rami Rkab ou Jalal Altawil — avec lesquels nous sommes toujours en conversation, sans qu’ils ne fassent ni l’un ni l’autre partie de la distribution finale.
Dans quels temps vivons-nous ? La Terre se révolte porte les fruits d’une telle interrogation, la nôtre plus que jamais. La pièce tourne autour d’une question très simple dont la réponse ne peut être qu’empirique : comment deux personnes qui n’ont en commun ni la même culture, ni le même sexe biologique, ni le même statut social, parviennent-elles à se parler vraiment, à «faire conversation»? C’est cette passion de la conversation qui fut le point de départ de toute la dramaturgie de la pièce.
Ainsi, dans l’écriture singulière de cette conversation théâtrale, ont pu se loger assez naturellement, au fil du travail, les zones d’ombre et de lumière, les inquiétudes profondes mais incontournables de nos temps présents : la guerre, le terrorisme, le racisme, l’amour, le désir, le désespoir mais aussi l’espérance politique. A partir de là, de la légèreté presque naturelle de ce dialogue, d’autres formes de théâtre ont pu jaillir, d’autres modes d’expression se sont proposés à notre inspiration.
Convoquer des zones de parole radicalement différentes, des anachronismes inventés de toutes pièces, des ponts aériens entre Orient et Occident, entre monde d’hier et monde d’aujourd’hui, nous semblait le chemin le plus vivant et le plus concret pour essayer de faire surgir, sans moralisme ni surplomb, ce que notre époque nous fait au fond de nous-mêmes, ce qu’elle nous donne à penser et à imaginer.
Les différents espaces dramaturgiques ainsi ouverts par ce processus d’écriture très libre, rendent désormais possible la concrétisation d’un théâtre où plus que jamais le corps de l’acteur.trice va pouvoir trouver sa liberté, sa poétique et son humour.
Librement inspiré du récit Le petit terroriste d’Omar Youssef Souleimane publié par Flammarion (2018)
Sara Llorca a été élève au Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique de Paris (2006-2009), dans les classes de Dominique Valadié et de Yann-Joël Collin notamment. Elle est actrice, notamment dans les spectacles de Wajdi Mouawad – figure marquante dans son parcours. Avec lui, elle joue à Athènes (Grèce), à Avignon (Carrière Boulbon), au Québec (TNM Montréal), au Liban et dans le cadre de “Mons 2015 -ville européenne de la culture”. Elle joue aussi sous la direction de Jacques Lassalle; Georges Werler et Michel Bouquet; Denis Llorca; Stéphanie Loïc; David Bobée; Élisabeth Chailloux; David Lescot.
Elle est chanteuse pour le groupe Les Indolents (2011-2015), aux côtés d’Adrien Tronquart, Benoît Lugué et Bertrand Noël. Elle poursuit ses expériences musicales dans le projet Cycles – compositions de Benoît Lugué.
En décembre 2016, elle assure la mise en scène de l’artiste Fishbach (création Trans-Musicales de Rennes) et plus tard celles des groupes Téorem, SuperBravo et Maud Lübeck. Elle est metteure en scène et travaille à partir des textes de Brecht (Tambours dans la nuit), Shakespeare (Les Deux nobles cousins), Rimbaud (Les Illuminations), David Lescot (Théâtre à la campagne), Sarah Kane (4.48 Psychose), Euripide (Les Bacchantes).
Depuis 2016, elle est engagée par le Théâtre national de La Colline pour diriger différents ateliers de pratiques artistiques (Lycée Victor Hugo, Collège Lucie Faure, “Premier Acte, acte 3”).
Elle est marraine de la promotion 2020 de l’Ecole supérieure d’art dramatique de Paris (ESAD) et met en scène quatorze jeunes acteurs et actrices dans Dom Juan, Remix d’après Molière.
Elle est artiste associée au CDN de Nancy-Lorraine.
Omar Youssef Souleimane est né en 1987 à Quoteifé, sur les plateaux du Kalamoune à une quarantaine de kilomètres au nord de Damas. Après avoir obtenu un baccalauréat scientifique en 2005, il étudie la littérature arabe à l’université de Homs. Entre 2006 et 2010, il a été correspondant de la presse syrienne, et a collaboré avec de nombreux journaux arabes. Il est l’auteur de livres de poésie, Chansons de saison en 2006, Je ferme les yeux et j’y vais, prix koweitien Saad Al Sabbah en 2010.
Ayant participé aux manifestations pacifiques dès mars 2011 à Damas puis à Homs, il a été recherché par les services de renseignements syriens.
Afin d’éviter la prison, il est entré dans la clandestinité et est parvenu à quitter son pays. La France, où il vit depuis 2012, lui a accordé l’asile politique. Il a publié depuis son exil plusieurs recueils de poésie, Il ne faut pas qu’ils meurent en 2013 aux éditions Al Ghaoune – Liban ; La mort ne séduit pas les ivrognes en 2014, bilingue français / arabe, aux éditions L’oreille du loup – Paris, prix Amélie Murat 2016; L’enfant Oublié en 2016 aux éditions Signum ; Loin de Damas en 2016 aux éditions Le temps des cerises ; Le Petit terroriste (récit), Janvier 2018 aux éditions Flammarion.
Après des études à la Sorbonne (agrégation de philosophie, licence de lettres) et une formation théâtrale au cours Florent, Guillaume Clayssen aborde la mise en scène comme assistant de Marc Paquien. Il collabore régulièrement en tant que dramaturge auprès notamment de Sara Llorca, Guy Pierre Couleau et Cécile Backès. Son travail de metteur en scène le porte vers des écritures non dramatiques. Agencer les textes et les formes artistiques sur scène (musique, chant, photographie, cinéma, vidéo), est l’un des fils conducteurs de sa recherche.
Certains des spectacles qu’il met en scène sont des écritures de plateau qui peuvent porter sur l’attention (Attention! Attentions!), le cinéma (Cine in corpore) ou les vanités (Memento mori). La figure de Jean Genet tient chez lui une place à part. Il monte l’une de ses pièces les plus connues, Les Bonnes, mais aussi quelques fragments de son texte posthume sur les palestiniens, Un Captif amoureux.
La poésie – celle de Fernando Pessoa (Je ne suis personne), et les écritures transgenres qui mélangent narration, philosophie, politique (Lettres persanes de Montesquieu, coup de coeur en 2016 de l’émission de France-Culture « La Dispute »), l’attirent particulièrement.
Sa nouvelle création, Jeunesse de Joseph Conrad, fait l’ouverture du festival Spring 2018 au Trident à Cherbourg et mélange théâtre et cirque. Le spectacle est notamment programmé à L’échangeur de Bagnolet fin septembre-début octobre 2018.
Enfin, à côté de son activité de metteur en scène, Guillaume Clayssen réalise plusieurs courts-métrages primés en festival, collabore depuis plusieurs saisons à la Comédie de l’Est (C.D.N. de Colmar) et enfin donne des cours de dramaturgie philosophique à L’école Auvray-Nauroy.
Production Compagnie du Hasard Objectif.
Coproduction MC93 Maison de la Culture de Seine-Saint-Denis / Bobigny, Théâtre Gymnase-Bernardines / Marseille, MC2 Maison de la culture – Scène nationale / Grenoble, Les Célestins / Théâtre de Lyon, Le Point des arts / Cesson-Sévigné.
Avec le soutien de l’Adami et de la Spedidam.
Projet bénéficiant du Fonds d’Insertion pour Jeunes Comédiens de l’ESAD – PSPBB.
Avec la participation artistique du Jeune théâtre national.
Administration et diffusion En Votre Compagnie Olivier Talpaert et Adeline Bodin.
Remerciements Hortense Archambault, Antoine Abdo-Hanna, Catherine Rétoré, Leyla-Claire Rabih, Myriam Montoya, Bénédicte Vigner.